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Sight Seeing

Jean-Kenta Gauthier | Vaugirard

18 septembre 2021 - 24 octobre 2021

Jean-Kenta Gauthier Vaugirard
4, rue de la Procession 75015 Paris

Horaires: mercredi - samedi, 14h - 19h & dimanche 24 octobre, 14h - 19h


Vernissage: samedi 18 septembre, 16h - 19h


Brunch avec Mishka Henner: dimanche 24 octobre, 10h - 16h

Depuis 2010, Mishka Henner explore la nature de la photographie à l’ère post-Internet en réutilisant du matériel visuel et documentaire trouvé en ligne. Étudiant l’histoire de l’art, la culture numérique et l’économie de marché, il est l’auteur d’enquêtes critiques et souvent controversées sur le capitalisme technologique et ses effets sur notre environnement physique et social.

Avec Sight Seeing, Henner se concentre sur son propre regard en utilisant un logiciel d’oculométrie, autrement appelé « eye tracking », pour suivre le mouvement de ses propres yeux sur un sujet. De nombreux artistes ont décrit leurs œuvres comme n’existant que lorsqu’elles sont vues et expérimentées par un spectateur, à l’instar de l’adage de Marcel Duchamp selon lequel c’est le regardeur qui fait l’oeuvre. Dans cette exposition, Henner interprète cette idée littéralement en créant une série d’œuvres par le simple fait de regarder.

L’oculométrie est une technologie souvent utilisée dans la recherche scientifique, les études de marché, les jeux et la conception de produits pour déterminer comment et où se concentre l’attention des spectateurs. Ici, Henner utilise cet outil pour capturer son regard alors qu’il se déplace sur une image trouvée de High Yellow du peintre américain Ellsworth Kelly (1923 - 2015). L’utilisation de la couleur et les formes faussement simples de Kelly démentent souvent leurs origines documentaires et, depuis de nombreuses années, Henner est fasciné par la capacité du peintre à transformer des détails banals de la vie quotidienne en abstractions audacieuses.

Soixante et un ans après que Kelly a réalisé High Yellow, Henner a observé pendant dix secondes une image trouvée du tableau de Kelly et l’a encastrée dans une boîte découpée au laser, l’image n’étant visible qu’à travers une ouverture créée par le regard de Henner. Dans la présentation des résultats, le regard global est divisé en tranches de temps d’une seconde. La séquence d’œuvres qui en résulte est une présentation temporelle de ces observations accumulées. Chaque résultat génère sa propre forme abstraite unique, et progressivement révèle l'oeuvre originale sous-jacente.

Ellsworth Kelly a vécu à Paris en tant que jeune artiste à la fin des années 1940 et au début des années 1950, où il a trouvé son inspiration dans l’architecture de la ville et a créé certaines de ses premières compositions abstraites. Influencé par les œuvres d’artisans médiévaux anonymes, il s’est efforcé d’éliminer la trace de sa main de ses toiles pour créer des peintures en aplats de couleurs. L’utilisation par Henner d’un logiciel d’oculométrie et de la découpe au laser peut être considérée tel un écho à la méthode de Kelly, mais réalisée à l’aide d’outils et de technologies contemporains.

L’intérêt de Henner pour le questionnement de la nature de la paternité en art est manifeste dans des œuvres antérieures telles que Less Américains et Richtered (toutes deux réalisées en 2012). Pour Less Américains, Henner a produit des scans haute résolution du livre photographique historique de 1958 de Robert Frank, Les Américains, a zoomé sur chaque image et a minutieusement effacé les détails et les contours jusqu’à ce que seules des traces squelettiques des photographies originales subsistent. Un projet à propos duquel Henner a écrit : « En 1953, Robert Rauschenberg a effacé un dessin de Willem de Kooning. J’ai lu à ce sujet et ai compris l’impulsion de Rauschenberg. Je me suis demandé ce qui se passerait si l’on faisait la même chose avec l’œuvre d’un géant de l’histoire de la photographie. Il s’agissait forcément des Américains, oeuvre sacralisée et mythifiée au point qu’un demi-siècle plus tard, elle a généré sa propre industrie de vénération » . Dans Richetered, Henner a observé des parallèles dans les peintures de Gerhard Richter et d’Ed Ruscha et les a mélangées numériquement pour créer de nouvelles couches de sens là où les auteurs les avaient auparavant niées.

À propos de l’exposition Sight Seeing, Henner déclare : « Le suivi du mouvement de l’œil nous montre que l’acte de regarder est intrinsèquement créatif. Il n’y a jamais deux observations identiques, l’œil est constamment en mouvement et chaque observation est unique. Lorsque vous appliquez ce principe à l’observation de l’art, cela remet en question le caractère sacré et la fixité de l’original puisque chaque observation crée elle-même une nouvelle image. »

Les œuvres de l’exposition se composent de onze boîtes découpées au laser et placées sur une reproduction du tableau d’Ellsworth Kelly, chacune représentant l’accumulation de tranches de temps d’une seconde. La première oeuvre, à la surface intégralement noire, ne laisse pas encore apparaître le tableau de Kelly car l’expérience n’a pas encore commencé, tandis que la dernière constitue l’accumulation des dix secondes d’observation par Henner. Cet ensemble d’œuvres intitulé Ellsworth Kelly’s High Yellow, 1960 [Ten Seconds] (2021) est accompagné de la présentation du portfolio Ellsworth Kelly’s Blue and Orange (Bleu et Orange), 1964-5 [Six Seconds] (2021). Dans les bureaux de la galerie est également exposé le portfolio Less Américains (2012) comprenant l’ensemble complet de 83 tirages argentiques.


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Ill.: Mishka Henner, Ellsworth Kelly's High Yellow, 1960 [7 Seconds], 2021. Boîte découpée au laser abritant un tirage pigmentaire monté sur Dibond. 70 x 50 x 5 cm. Édition de 2 + 1 épreuve d'artiste. Image © Mishka Henner

Communiqué de presse

Liste des oeuvres